Le collectif afro-féministe Filhas de Dandara s’est réuni le 26 juillet 2020 pour célébrer sa première édition de la Journée internationale des femmes noires d’Amérique latine et des Caraïbes. Au Parc de Choisy à Paris, nous étions 12 membres en présentiel (Aline do Carmo, Denilza Lopes, Jéssica Assard, Junior Assard, Nelma Barreto, Ana Godeiro, Luciene Silva, Fabiana Sodré, Lilian Moreiras, Stephie Gibs, Ong Ni, Paula Pereira), et 2 membres à distance (Diana Cissé et Ana Assard), pour accompagner et débattre de la vie de certaines femmes noires qui sont des références dans les pays d’Amérique latine et des Caraïbes. Chaque participant a pu présenter l’histoire d’une leader, ainsi nous avons eu l’occasion de discuter autour de la vie de Tereza de Benguela, Daniela Jefry, Toya Montu, Sueli Carneiro, Ana Maria Matamba entre autres.

Avant de commencer les présentations, une brève explication de l’histoire de cette journée a été faite et nous avons souligné l’importance de se souvenir de cette journée à chaque année.

Le 25 juillet 1992, des groupes afro-féministes noirs de 32 pays d’Amérique latine et des Caraïbes se sont réunis à Saint-Domingue, en République dominicaine, pour dénoncer l’oppression et discuter de solutions contre le racisme et le sexisme. Cette journée a été marquée dans l’histoire et a été reconnue par les Nations Unies (ONU) comme la Journée internationale des femmes noires d’Amérique latine, des Caraïbes et de la diaspora1. De cette rencontre est née La Red de Mujeres Afrolatinoamericanas, Afrocaribeñas y de la Diaspora2, un espace d’articulation des mouvements de femmes noires en Amérique latine et dans les Caraïbes, et un instrument politique de réflexion, d’échange, de dénonciation et de proposition de projets de femmes afro descendantes. Pour orienter les actions visant le bien-être des femmes noires, elles ont commencé à cartographier les conditions de vie de ces femmes tant dans les Caraïbes qu’en Amérique latine. Il été observé qu’à ce jour, sur les 25 pays les plus violents pour les femmes noires, 15 sont situés en Amérique latine et dans les Caraïbes3.

Parmi eux, le Brésil occupe le deuxième rang des pays les plus violents4. Actuellement, les données de l’Institut brésilien de géographie et de statistique (IBGE) montrent que l’écart entre les femmes noires et les autres couches de la société en ce qui concerne l’accès aux besoins de base et aux opportunités au Brésil est encore large. Selon l’enquête IBGE 2019, les femmes noires au Brésil ont un salaire moyen 56% inférieur à celui des hommes blancs, elles constituent la majorité des mères célibataires au Brésil et les foyers dirigés par des mères célibataires et noires sont parmi les plus vulnérables où 13,9% n’ont pas d’eau potable et 40% n’ont pas de traitement des eaux usées. Les données de l’atlas de la violence5 de l’année dernière montrent que 60% des femmes victimes d’homicide étaient noires. Cette violence doit cesser!

Au Brésil, la Journée internationale des femmes noires d’Amérique latine et des Caraïbes et de la diaspora marque également un hommage à Tereza de Benguela, leader quilombola au XVIIIe siècle, un exemple de la lutte et de la résistance des femmes noires contre l’esclavage et l’oppression. Ce jour a été officiellement adopté6, le 2 juin 2014 par la loi n ° 12 9877, sous le mandat de la présidente Dilma Rousseff.

Tereza de Benguela est devenue la reine du quilombo de Quariterê (1730-1795)8, située dans la région de Vale do Guaporé à la frontière entre le Mato Grosso et la Bolivie, à la mort de son mari, José Piolho. Elle s’est avérée être un leader naturel et a organisé toute la structure politique, économique et administrative. Reine Tereza:

    • a dirigé la population noire et indigène du quilombo pendant 20 ans,
    • a créé d’un parlement local et élection de quelques conseillers,
    • a organisé la production d’armes avec des objets métalliques qui ont été volés ou échangés
      avec des blancs ou dans les villages voisins,
    • a développé l’agriculture, en faisant l’organisation de la plantation, de la récolte et de la
      vente (quand ils avaient un surplus) de denrées alimentaires comme le maïs, les haricots, le
      manioc, les bananes;
    • a structuré la fabrication des tissus (en métiers à tisser) et systématisé la production de
      coton. Les tissus produits étaient vendus dans d’autres villages.

Tereza de Benguela a été tué dans une embuscade en 17709, qui a fini par capturer et tuer certains membres du quilombo, dont 79 Noirs et 30 autochtones10. Certains membres qui ont réussi à s’échapper ont reconstruit le quilombo. Même ainsi, il a continué à être attaqué par l’armée et en 1795, il a été complètement détruit11.

En 1994, l’école de samba Grêmio Recreativo Unidos do Viradouro, de Rio de Janeiro, a rendu hommage à Tereza avec l’histoire Tereza de Benguela – Une reine noire dans le Pantanal. Et cette année (2020), l’école de samba de São Paulo, Barroca Zona Sul, lui a également rendu hommage avec Benguela… Barroca vous crie, Tereza12.

Le 25 juillet pour nous du collectif afro féministe Filhas de Dandara est une façon de se souvenir des luttes qui sont venues précisément pour que nous puissions être ici vivant.e.s aujourd’hui. Cette journée est également célébrée pour renforcer des réflexions et des propositions de lutte contre le racisme et le machisme dans toutes les sphères de la société.

Aline do Carmo.
Co-fundadora da Association Oyà.
Pesquisadora em educação e contextos internacionais.
e aluna do Ngoma Capoeira Angola.