Par Mariâme Damba
D’abord, ils nous ont raconté comment ils avaient triomphé de nos Pères et de nos Mères.
Comment ils les avaient déracinés pour les enchaîner.
Les Nôtres étaient devenus leurs.
Et c’est ainsi que nous sommes devenus proches. Intimité mortelle faite d’étreintes morbides.
Ils ont ravi l’Humanité de nos Ancêtres. Se faisant, ils ont vendu la leur.
Deux Humanités perdues pour une dose de café et de sucre.
Leurs bouches sont devenues sucrées comme le miel. Elles se sont emplies de fiel.
Fiers d’être les pourvoyeurs de mort, ils ont déchiré les chairs de nos Ancêtres, piétiné leurs dignités,dépiauté leurs cœurs, extorqué leurs âmes.
Ils ont marchandé avec leur Dieu.
Dans la démence la plus obscure, le délire le plus abject, les voilà devenus les mains de Dieu, les lumières de la civilisation.
Fanatique imposture.
Désormais, sous le poids de leurs regards déments et libidineux, il n’existait plus que des chaises, des armoires et des placards.
Peut-être que leur Dieu, qui aimait tant le sucre et le café, a applaudi. Peut-être…
Nos Ancêtres ont résisté jusqu’à ce qu’une aube ensanglantée sonne le glas de la Victoire.
Ensuite, eux, les « Egos » de Dieu ont décrété que l’Histoire se ferait muette. Contraints à trouver une autre saveur au sucre et au café.
Et leur Dieu anthropophage, ivre de sang et rassasié de chairs, s’en irait, silencieusement, vers d’autres horizons.
Cependant, « la Vérité n’a pas de cimetière. Elle tarde à rejoindre le village mais, en son heure, trouve toujours une bouche pour la recevoir » a dit, un jour, un sage 1 .
Ils avaient oublié que la Vie est l’unique joyau. Une bouche qui ne souffre d’aucun silence.
De la Puissance de vie de nos Pères et de nos Mères, nous nous souvenons.
Dans nos corps, dans nos souffles, dans nos cœurs et nos âmes reconquises.
C’est aussi cela notre Héritage. La Terre de notre Renaissance.
Mariâme Damba est pédagogue, térapeute,
professeure de danse et professeure de
Capoeira à L’École de Capoeira Angola Paris.
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